Accaparement des terres pour l’huile de palme : comment les récupérer ?

Imaginez que vous soyez légalement propriétaire d'un terrain et qu’on vous oblige à le céder à un grand producteur d'huile de palme. C'est ce qui est arrivé à des centaines de familles dans le Sulawesi central (Indonésie). Notre partenaire TUK y a aidé des communautés spoliées à récupérer leurs terres. 

L’huile de palme est l’huile végétale la plus utilisée dans le monde. On la retrouve dans l’huile de friture, les biscuits, sauces, chips, margarines et même dans les produits de beauté. Il y a de grandes chances que vous utilisez au quotidien un produit qui en contient.

Afin de répondre à la demande mondiale croissante, d’immenses pans de forêt tropicale sont défrichés pour faire place à des méga-plantations de palmiers à huile. Souvent, les agriculteurs et les agricultrices sont contraint.e.s de céder leurs terres à des grands producteurs. Cette pratique d’accaparement des terres est très répandue en Indonésie.

La communauté agricole de trois villages de la région de Banggai, sur l'île indonésienne de Sulawesi, a subi de tels accaparements. TUK (Transformasi untuk Kaedilan - Transformation pour la justice), un partenaire d'Oxfam qui milite pour la culture d’une huile de palme durable, l’a soutenue dans sa lutte pour récupérer ses terres.

Deux hectares de terre par famille

En 1992, le gouvernement indonésien a appelé les populations agricoles pauvres des îles densément peuplées de Java, Bali et Lombok à migrer vers des régions moins peuplées telles que le Sulawesi central. Des centaines de familles ont répondu à l’appel et se sont installées sur les îles Banggai, où chaque famille a reçu deux hectares de terres à cultiver.

Umiyata (photo) a émigré de Java avec ses parents étant petite. Pendant des années, la famille a cultivé du maïs et du soja. « C’était une vie difficile », se souvient Umiyata. Une grande partie de leurs terres est restée longtemps inexploitée car la jungle y est tellement dense que le défrichage était laborieux sans machines agricoles.

Des terrains pour l’huile de palme

En 2009, l'entreprise d'huile de palme Wira Mas Permai (WMP) a proposé aux agriculteur.trice.s un contrat pour cultiver des palmiers à huile. La plupart ont sauté sur l'occasion, car la WMP leur proposait de défricher leurs terres et de partager les bénéfices. Pendant cinq ans, ces familles ont été chargées de planter, fertiliser et récolter les palmiers. En 2014, des licenciements massifs ont eu lieu et les travailleur.euse.s n'ont jamais vu la couleur des gains accumulés par la WMP alors qu’ielles s’étaient endettés pour payer les matériaux et les engrais.

Les paysan.ne.s ont protesté en demandant la restitution de leurs terres et en détruisant les palmiers. La WMP a riposté avec des menaces et en exigeant des réparations. La TUK est intervenue auprès des victimes en leur fournissant des conseils juridiques et en faisant du lobbying auprès du gouvernement indonésien.

Des années de lutte contre l’accaparement des terres

Agus R. Tatu, leader d’un syndicat agricole local, a lui été confronté à l’accaparement de terres à deux reprises. Une première fois dans le nord du Sulawesi, qui l’a forcée à émigrer à Banggai, où il a été à nouveau victime de ce procédé. Agus et les vingt autres familles qui s’y étaient installées, ont alors créé un syndicat agricole qui a pris part à la bataille contre la WMP. Après les licenciements massifs, ils ont récupéré 150 des 180 hectares de terres spoliés.

Mais l'entreprise a riposté. Il y a deux ans, Agus a été arrêté en même temps que neuf autres collègues après avoir été accusés par la WMP de voler des récoltes et du bois. Avec le soutien de la TUK, ils ont tenu tête à l’entreprise, ont fait valoir leurs droits fonciers et n’ont finalement pas été condamnés. Mieux, la WMP a été contrainte de leur restituer leur terrain.

De l’huile de palme durable

« La TUK nous a aidé à plaider notre cause en prodiguant des conseils juridiques gratuits. Grâce à leur soutien, nous n'avons pas abandonné et sommes parvenus à faire du gouvernement un allié dans cette affaire. Nous les avons convaincus que l'agriculture à petite échelle pouvait être une alternative prometteuse et rentable à l’approche industrielle », explique Agus.

En effet, la communauté a pu prouver qu’elle était en possession de certificats fonciers reçus des mains du gouvernement indonésien à l’époque de leur migration à Banggai. Après une longue bataille juridique, les familles ont récupéré 75 % de leurs terres.

Leadership féminin

Afin que les exploitations soient pleinement autosuffisantes, La TUK dispense aux familles des formations en techniques agricoles durables, en comptabilité et en entreprenariat.

Umiyata (gauche), qui a pu récupérer ses terres avec l'aide de la TUK, a suivi une formation en leadership féminin. Elle est aujourd'hui présidente de la coopérative des agricultrices de son village. « Cette formation m’a appris à défendre mes opinions et résoudre nos problèmes », dit-elle. Aujourd’hui, Umiyata gère sa ferme de manière efficace. Les palmiers ont disparu et ont fait à nouveau place au maïs. Avec les recettes, elle a acheté 20 vaches, un investissement judicieux pour son entreprise agricole.

Photos ©Ilvy Njiokiktjien/OXFAM

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